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Après l'effort, le réconfort
30 décembre 2014

Supprimer les notes et le redoublement à l'école ? Des mesures pour amuser la galerie

LE PLUS. Fin de la notation traditionnelle, suppression du redoublement ou encore arrêt de l'apprentissage de l'écriture cursive : les suggestions pour lutter contre le décrochage scolaire ne manquent pas. Selon le linguiste Alain Bentolila, ces solutions superficielles sont uniquement destinées à "enfumer" les Français. Explications.

Par 
Linguiste

Édité par Barbara Krief 

http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1294427-supprimer-les-notes-et-le-redoublement-a-l-ecole-des-mesures-pour-amuser-la-galerie.html

Une classe de primaire à Toulouse en France à la rentrée 2014 (image d'illustration)

Une classe de primaire à Toulouse en France à la rentrée 2014 (Fred Scheiber/20 Minutes/SIPA)

 

Durant ces 40 dernières années, on est passé brutalement d’une situation où trois élèves sur quatre n’accédaient pas à l’enseignement secondaire, à celle où, aujourd’hui, tous les élèves y entrent et y restent au moins cinq ans. On comprend bien qu’une telle révolution a profondément et brutalement transformé la composition sociale et culturelle de la population scolaire.

 

L'école a raté sa démocratisation

 

Lorsque s’est levée la barrière d’une sélection qui était injuste et cruelle, un nombre considérable d’enfants, auparavant écartés, se sont trouvés précipités dans un système qui n’était pas conçu pour eux. Il eût donc fallu que cette école se transformât en profondeur dans ses contenus, sa pédagogie, la formation de ses maîtres et ses finalités professionnelles. Elle est en fait restée quasiment identique à elle-même. Le résultat est que si l’école a réussi sa massification, elle a raté sa démocratisation : 150.000 élèves la quittent sans aucun diplôme, pour la plupart en situation d’illettrisme. Aujourd’hui on tente de donner le change en sortant de la naphtaline quelques mesures, régulièrement présentées comme décisives depuis 1969.

 

Ces annonces, sans analyses sérieuses, appuyées sur des comparaisons internationales superficielles veulent cacher que notre école navigue entre complaisance et cruauté, maquillant l’échec en abaissant régulièrement ses ambitions et ses exigences. Au lieu d’amuser la galerie, la seule question à laquelle devraient répondre avec franchise et lucidité nos ministres est la suivante :

 

"Acceptons-nous que le destin scolaire et social d’un enfant soit scellé selon qu’il est né du bon ou du mauvais coté du périphérique, selon qu’il vit en zone urbaine ou rurale ou selon qu’il appartient à une famille culturellement favorisée ou non ?"

 

La réponse à une telle question dépasse de très loin les mandats politiques et les postures mondaines. Elle permet de distinguer les égoïstes cyniques des humanistes généreux. On trouve d’ailleurs les uns et les autres à droite comme à gauche. Il nous faut donc inscrire au cœur du projet politique d’éducation le pouvoir de résilience de l’école. C'est à la lumière de cette volonté qu'il faut dénoncer ces écrans de fumée idéologiques que représentent la suppression des notes, la disparition du redoublement ou la fin de l'écriture manuelle.

 

La suppression des notes ne changera rien au destin

 

L’éducation nationale s’est ainsi récemment mis en tête qu’il fallait supprimer les notes afin de ne pas décourager les élèves qui font des fautes. Qui donc nous fera croire qu’il suffirait de ne plus quantifier les difficultés d’apprentissage pour régler le problème de l’échec scolaire et du désenchantement qui touche une bonne part des élèves !

 

Evidemment la mesure est tentante ! Supprimer les notes ne coûte rien, et, en plus, on occupe le terrain médiatique en donnant l’impression d’avoir fait quelque chose d’utile et de concret. Et enfin nous dit-on : "braves gens, regardez donc les résultats de pays qui on suivi cette voie, ils sont mieux classés que nous !"

 

Pauvre argument qui néglige notamment la différence de qualité de la formation et du statut des maîtres si médiocre chez nous.

 

Incompétence ou cynisme, nos responsables, dépassés par la faillite de notre système, sont prêts à s’accrocher à n’importe quel gadget et nous racontent n’importe quoi ! Car enfin, nous savons bien que la suppression des notes ne changera rien au destin, malheureusement programmé, des élèves fragiles.

 

La question n'est pas de choisir entre une notation sur 10 ou sur 20 ; la question n'est pas d'instaurer un système de couleurs ou un système de lettres ; tout cela n'est que poudre aux yeux ! La seule question qui vaille c'est que l'on instaure un système d'évaluation qui identifie les difficultés singulières de chaque élève et le rythme singulier de chaque parcours d'apprentissage afin que sur cette base on instaure une démarche de différenciation pédagogique lucide qui accompagne chacun selon ses besoins.


Deuxième tour de passe-passe : la suppression du redoublement

 

Ce n'est pas la voie qui se dessine aujourd'hui. Deuxième tour de passe-passe, la suppression du redoublement ! En l’état de notre système éducatif, rendre le redoublement exceptionnel comme le propose la Ministre ne va pas changer le caractère inéluctable de l’échec scolaire de certains enfants. Tout au plus pourra-t-on différer la manifestation de l’échec.

 

Le vrai défi c’est de transformer la logique de rupture actuelle en logique de continuité et d’accompagnement afin de passer d’un système complaisant et cruel à un système alliant exigence et générosité.

 

Pour cela il conviendrait de gérer avec lucidité le passage des différents paliers que les élèves ont à franchir de la maternelle à l’université en mettant en place des sas de transition. C’est à dire des bilans réguliers situés suffisamment tôt dans l’année pour identifier les difficultés spécifiques de chacun et permettre une véritable remise à niveau.

 

C’est justement ainsi que procèdent les pays qui ont les meilleurs résultats sans pour autant dépenser plus que nous pour l’éducation. Là encore cela exige une transformation en profondeur de l’organisation des établissements, une révision complète des programmes et une formation des maîtres à la hauteur des enjeux.

 

L'écriture cursive est essentielle à l'apprentissage

 

Au-delà de l'emballement un peu rapide sur la prétendue fin de l'enseignement de l'écriture manuscrite en Finlande, n'est-il pas à craindre qu'un jour, vraiment, la fin de cet enseignement devienne réalité. Une telle perspective aurait des conséquences dramatiques sur la formation intellectuelle des élèves.

 

C'est en traçant soit même ses mots soigneusement choisis que l'on prend conscience de leur composition graphique et phonique ainsi que de leur organisation syntaxique. Or c'est cette conscience qui va porter l'apprentissage de la lecture. En d'autres termes, c'est l'écriture manuelle maitrisée qui assure une lecture précise et fluide.

 

C'est aussi en écrivant de sa main que l'on grave mots et textes dans sa mémoire. Considérez donc notre comportement lorsque nous hésitons sur l’orthographe d’un mot. Ce n’est pas à un clavier que nous confions le soin de réveiller notre mémoire orthographique c’est à notre main qui, trace plusieurs formes possibles que nous confions notre choix.

 

Seules les pages écrites par la main d’élèves rendus attentifs à la qualité graphique, à l’organisation et à la correction des mots affirment leur passage dans une classe et les efforts qu’ils y ont fournis pour y laisser leur propre trace. Une trace superbe ou médiocre, mais la leur, dessinée de leur propre main, forgée par leur propre intelligence dans l’exaltation et le labeur solitaires.

 

C’est bien ce labeur d’écriture manuelle dont nul autre ne peut les décharger que l’on doit leur apprendre à chérir ; parce que le soin obstiné qu’ils portent à la forme comme au sens construit la conscience d’eux-mêmes et le goût de l’Autre. L’abandon insidieux de l’acte d’écriture manuelle serait le coup le plus terrible que l’on pourrait porter à l’école républicaine.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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23 décembre 2014

message pour toi l'ado

 

 

 

ado

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

13 décembre 2014

humiliation

 

Entendre pendant 1 heure en conseil de classe de 3è des parents se plaindre du niveau médiocre de la classe en math (8/10 de moyenne au 1er trimestre), aller en cours avec cette classe, rendre un devoir (dont j'avais donné par avance les questions - ben ouais ! pour les motiver à apprendre pour avoir la satisfaction de recevoir une bonne note-) médiocre, vérifier le travail maison du jour, constater que 12 sur 30 n'ont pas fait leur travail. Gronder et entendre une tête "blonde" dire "Madame, vous n'avez pas le droit de nous humilier" Et avoir envie (mais alors d'une force) de lui dire de se tirer les doigts du nez, en lui prenant sa crête de cheveux fraîchement gominée dans ma main, et lui exploser le nez sur son cours.

 

Seulement voilà "HUMILIATION" en rendant une copie à des élèves et en leur disant :

     - "veux-tu aller en seconde générale ?

     - oui

     - ALORS VA FALLOIR TE METTRE SERIEUSEMENT AU TRAVAIL ! parce qu'avec un 3/10 ton désir risque d'être compromis"

 

J'ai humilié un élève en proclamant tout haut sa note, alors que dés qu'ils ont leur copie entre leurs mains la première chose qu'ils font est de s'échanger leurs notes.

 

Je suis allée voir mon chef d'établissement pour lui en parler. Parce qu'il vaut mieux prendre ces devants au cas où un parent téléphonerait : Madame c'est inadmissible votre prof de math humili ses élèves !!!!

Et là ... que croyez-vous qu'il m'ait répondu ?

Je me dois désormais d'aller m'excuser. Ma posture n'était pas appropriée pour les stimuler. J'ai été maladroite dans ma façon de faire. 

Pensez-vous qu'il m'en ait proposé une autre ? Non bien sûr.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

9 décembre 2014

Aaah! les rapports d'inspection

Prof, j’ai été inspecté il y a huit mois. Le rapport vient d’arriverPrint

Monsieur le Prof
Professeur remplaçant
Publié le 05/12/2014 à 12h33

Au cours de notre année de stage, nous sommes inspectés lors d’une séance. De cette inspection, dépend notre titularisation. A partir de celle-ci, nous sommes un peu lâchés, en roue libre, dans notre métier – sachant qu’on sera inspectés au mieux tous les cinq à dix ans.

On vient nous inspecter sur une séance bien précise, en nous prévenant quelques jours à l’avance, histoire de bien nous laisser le temps de préparer quelque chose qui plaira certainement à l’inspecteur, même s’il ne s’agit pas de notre façon d’enseigner habituelle.

Quand on est élève, on s’imagine qu’être prof, c’est se ramener en cours avec un livre, l’ouvrir à une page et suivre ce qui est écrit. Bon, certes, il y a certains profs qui fonctionnent comme ça, mais dans les faits, c’est un peu plus complexe.

Je vais prendre l’exemple du cours que j’ai fait le jour de mon inspection pour vous expliquer comment on est censés construire notre cours. Je dis bien « censés », car même si j’essaie de suivre cela au maximum, cela demande énormément de temps et surtout d’inspiration pour parvenir à ce résultat.

Ecrivez à votre « moi » futur

Les enseignants en langue doivent actuellement suivre ce qu’on appelle la « méthode actionnelle », c’est-à-dire qu’il ne suffit pas d’expliquer une règle grammaticale à un élève, il faut créer une situation où l’élève aura besoin de cet outil grammatical pour mener à bien ses objectifs.

Grâce à une collègue de Twitter, j’ai trouvé l’objectif que devront mener à bien mes élèves : écrire une lettre à leur « moi » futur, lettre qu’ils ouvriront dans dix ans, par exemple. Pour mener à bien cette tâche, il faudra entre autres qu’ils sachent utiliser les pronoms réfléchis, par exemple pour dire « Cher moi-même », mais également le Present Perfect. Ce temps permet de dresser un bilan, il leur permettra donc de demander à leur « moi futur » ce qu’ils ont fait de leur vie en dix ans. Par exemple :

« Have you ever been to England ? »

« Have you learned how to drive ? »

(Es-tu déjà allé en Angleterre ? As-tu appris à conduire ?)

J’ai donc un objectif final, deux outils grammaticaux. A cela, doivent s’ajouter du vocabulaire et une approche culturelle de la chose, et voilà, le squelette de mon cours est formé. Une séquence est composée de huit séances maximum (sinon les élèves se lassent du thème abordé). Il me semble qu’en six séances, soit deux semaines de cours, mon objectif peut-être atteint.

Dur, dur de se rappeler de son contrôle

Me voilà donc à la recherche de documents pour permettre aux élèves de réussir au mieux :

  • un extrait de film, « Prédictions », où une classe enterre une boîte contenant des objets, afin de l’ouvrir quelques années plus tard ;
  • une photo de la « Disney Time Capsule », qui existe vraiment et qui contient des objets Disney ;
  • une chanson où un personnage parle à son moi futur ;
  • une BD de Calvin et Hobbes où Calvin écrit également à son moi futur...

Le tout est ensuite d’arranger ça pour que les savoirs arrivent progressivement, tout en maintenant l’intérêt de l’élève. Une alchimie pas évidente.

J’ai été inspecté sur ma deuxième séance de cette séquence, celle où j’ai fait travailler mes élèves sur la BD de Calvin et Hobbes.


Extrait d’une BD de Calvin & Hobbes (Bill Watterson)

C’est huit mois plus tard que j’ai enfin l’honneur de lire le rapport d’inspection, premier véritable retour sur ma façon d’enseigner. On nous dit souvent que les inspecteurs sont en sous-effectif, qu’ils ont énormément de travail, pas le temps de voir tout le monde... Mais tout de même, huit mois pour écrire et envoyer un rapport ? Entre-temps, l’année scolaire s’est terminée et j’ai eu le temps de changer deux fois d’établissement. Je repense à mes élèves prêts à m’étriper si je n’ai pas rendu un contrôle au bout d’une semaine, et je les comprends. Plus le temps passe, plus on oublie ce que l’on avait fait au contrôle.

En théorie, je suis d’accord mais...

Et force est de constater que huit mois plus tard, ce rapport perd de son impact. Heureusement, il commence par un résumé de la séance. Il s’agit d’une observation plutôt complète, même si je ne me souviens pas de tout ce dont il est question.


Extrait de mon rapport d’inspection : « Observation de la séance » (DR)

Ce que l’on appelle un « rituel », dans le jargon éducatif, c’est une activité récurrente que l’on fait à chaque début d’heure. Ainsi, effectivement, à chaque séance suivant le week-end, j’interroge les élèves sur ce qu’ils ont fait de leur week-end afin d’avoir une question connue mais dont la réponse change chaque semaine. Le but étant également de retravailler le prétérit.

L’inspecteur me signale qu’il « serait souhaitable d’aller au-delà et d’entraîner dans un second temps tous les élèves à construire du discours en s’appuyant sur ces éléments clés pour présenter le Disneyland Time Castle ». En théorie, je suis d’accord : chaque élève doit être sollicité. Mais dans la pratique, ce n’est pas évident à mettre en place. Ici, il n’y avait pas grand-chose à dire, peut-être cinq phrases maximum. Faire intervenir une vingtaine d’élèves risquait de vite tourner en rond et de les lasser – tout en prenant beaucoup de temps sur la séance.

Je ne vois pas où l’inspecteur veut en venir

« Les élèves s’interrogent sur la différence entre le present perfect et la voix passive. Il serait donc intéressant d’introduire du sens dans cette phase de PRL en attirant leur attention sur l’étroite corrélation entre le processus de passivation auquel sont soumis les sujets grammaticaux et le thème étudié. »

Concernant cette remarque, j’avoue ne pas la comprendre du tout. Je ne vois pas où l’inspecteur veut en venir et ce que j’aurais dû expliquer aux élèves.

L’inspecteur dresse un bilan, à lire ci-dessous :


Extrait de mon rapport d’inspection (DR)

Ce bilan, dans l’ensemble positif, relève plusieurs problèmes :

  • le fait de ne pas parvenir à faire travailler tous les élèves de la classe ;
  • le fait d’être trop frontal ;
  • le besoin d’étoffer le cours par des micro activités (ce qui améliorerait les deux points précédents) ;
  • la nécessité de répétition chorales (le fameux « repeat after me »)

Je comprends tout à fait le besoin de faire travailler tous les élèves de la classe et effectivement, proposer des activités courtes et simples permettrait de faire participer le plus grand nombre. Il est toutefois regrettable que dans le cadre de ce commentaire, aucune activité ne soit proposée par l’inspecteur. Il aurait été intéressant de me fournir des pistes afin que je sache précisément quoi faire travailler à mes élèves, et comment, afin d’améliorer mon cours.

« Repeat after me »

En ce qui concerne le fait de demander aux élèves de répéter après moi afin de bien prononcer un mot, je le fais en sixième et cinquième et les élèves aiment bien ça, mais c’est vrai qu’à partir de la quatrième, j’ai un peu plus de mal parce que c’est l’âge où ils commencent à avoir peur d’être jugés et à parler tout bas... Mais oui, un effort est à faire de ce côté-là.

Le fait d’être trop frontal m’avait déjà été reproché lors de ma toute première inspection, à l’issue de mon stage. Etre frontal, c’est le fait d’être, en tant que prof, au centre de la classe, être celui qui « distribue le savoir ». Cela peut paraître logique, mais la méthode actionnelle veut que l’élève soit le constructeur de son propre savoir, et que le prof s’efface au maximum.

Pour reprendre une formule d’un de mes formateurs : « Un cours idéal, c’est un cours où le prof ne parle pas. » Ce genre de formules claque bien, certes, mais m’énerve un peu. Je comprends tout à fait ce qui se cache derrière l’idée de l’élève qui construit son propre savoir.

Un petit exemple relativement très simplifié pour vous expliquer le principe.

Cherchez la règle

Un professeur « frontal » dira aux élèves :

« Au pluriel, on ajoute un S à la fin des noms, sauf pour “tooth” et “foot” et qui devienne “teeth” et “feet”. »

Dans la méthode actionnelle, le professeur notera plusieurs phrases au tableau :

« I have a dog. I have two dogs. I have a nose and two eyes.

The monster has got one big tooth and two small teeth. »

Et il dira à la classe : « Que remarquez-vous ? » La classe s’interrogera, et au fur et à mesure remarquera que parfois on met un S, parfois non. Et ce sont les élèves qui construiront la phrase : « Au pluriel, on ajoute un S... »

Le résultat est le même, mais dans le second cas, c’est bien l’élève qui est à l’origine du savoir, et donc, il assimile mieux la règle. Et je comprends la logique derrière cette méthode, je comprends son fonctionnement et ce qu’elle peut apporter. Mais bien souvent, cela demande énormément de temps pour observer une règle simple... et parfois, les élèves n’arrivent tout simplement pas à la voir, ou trouvent d’autres choses.

Dans l’exemple précédent, il est probable que certains élèves diront que quand on parle d’un animal, on rajoute un S alors que quand on parle du corps humain, c’est différent. Le fait de ne pas leur donner la règle directement peut les rendre confus.

Je sais qu’on attend de moi que j’utilise cette méthode, mais n’étant pas 100% en accord avec elle, je préfère ne l’utiliser que lorsque je suis certain qu’elle a un intérêt.

Créer un bon cours est pour moi un art

Comme vous pouvez le constater, faire cours est un peu plus complexe que dire : « Ouvrez le livre à la page 32 et faites les exercices. » Je trouve ça tout à fait fascinant : créer un bon cours est pour moi un art, et j’aime la réflexion que ça implique. Hélas, comme je l’ai dit, tous mes cours ne sont pas le fruit d’une telle réflexion, et bien trop souvent, je travaille dans l’urgence, à me demander ce que je ferai faire à mes élèves, sans avoir le temps de réfléchir en amont et sur la durée. J’espère que les années et l’expérience me permettront de me construire un catalogue de cours bien construits et pertinents afin de ne plus rencontrer ces problèmes.

Il est regrettable à mes yeux qu’à l’issue des formations auxquelles j’ai pu assister, on ne construise pas de séquence sous l’œil d’un formateur ou inspecteur afin d’avoir un « cours-étalon » sur lequel se baser. Car finalement, il faudra attendre de cinq à dix ans pour savoir si ce que l’on fait est en accord avec ce que l’on attend de nous.

   
  • Cosmic Slop
    Cosmic Slop
    Mothership Connection

    J’ai toujours eu beaucoup de difficultés en langue au collège/lycée, étant un élève plutôt moyen ou bon dans les autres matières.

    Je n’avais jamais de cours à réviser seulement trois bouts de notes en anglais prises pendant le cours qui m’apparaissait souvent totalement déstructuré et pendant lequel je dormais/dessinais/jetais des boulettes de papier. Souvent j’attendais « le cours » histoire de le noter pour l’apprendre plus tard, mais il n’arrivais jamais. Du coup mon retard s’est accumulé jusqu’à ce que je sois incapable de suivre pour de bon...

    Puis je m’y suis mis à l’université, avec des articles à lire en anglais il fallait bien, donc entre reverso et les cours de faculté j’ai finis par rattraper mon retard. Mais là j’étais autrement plus motivé.

    Avec le recul la méthode actionnelle me semble être une bonne méthode si on est sûr que les élèves suivent, mais comme vous le dites vous même ce n’est pas forcément le cas (et je suis bien placé pour le savoir) surtout au collège. En revanche cela me semble aussi être un très bon moyen pour perdre un paquet d’élèves en route, parce qu’avec un cours « frontal », au moins on peut rattraper et éviter d’être largué au bout de deux mois.

  • Pure et dure
    Pure et dure
    Tangeante

    Je vois que rien n’a bougé depuis dix ans.
    L’élève construit ses propres savoirs. Quelle phrase magique mais souvent dénuée de sens ! Après avoir parlé du temps pris pour faire « découvrir » aux élèves ce qu’on souhaite leur enseigner j’aimerais aussi faire remarquer le nombre d’enfants effectivement actifs dans ce genre d’entreprise. Sur 30 à 35 élèves, si l’on en trouve environ cinq qui participent, que font les autres si ce n’est au mieux écouter les tâtonnements que font leurs pairs avant d’arriver à l’objectif recherché par le prof ? Cette méthode issue du constructivisme me semble être très idéaliste mais pas vraiment... constructive.
    Tout prof sensé est bien sûr entraîné à provoquer des questionnements mais quand cela devient une méthode systématique j’ai l’impression d’assister à une dérive où seuls les éléments moteurs sont invités à participer. Nous sommes loin alors de tenter de diminuer les inégalités, bien au contraire.
    D’ailleurs le fait que les inspecteurs ne fassent jamais de démonstration prouve bien les limites de cette entreprise...

  • Cher collègue, je suis désolée pour toi que ton rapport ait tant tardé (j’ai reçu le mien 1 mois après mon inspection c’est ma 3ème année de titulaire). Je suis donc ravie de voir que mon inspecteur est efficace et surtout, qu’il donne des conseils, contrairement au tien. L’inspecteur était vraiment dans l’échange et il n’y a aucune surprise dans le rapport écrit. Je souhaite que tous mes collègues aient cette chance, parce qu’avoir quelqu’un qui écoute et conseille, dans un métier où il faut sans cesse se renouveler, ça fait du bien.
    J’ai eu moi aussi des remarques sur mon côté « dirigiste », la parole passe trop par moi (comme tu le fais remarquer, on doit s’effacer au maximum).
    J’ai beaucoup ri en voyant ton explication (très juste) de la méthode actionnelle, avec l’exemple du pluriel. C’est exactement ça. Combien de fois mes élèves m’ont parlé de TOUT, sauf de ce qu’ils avaient sous les yeux... Trop peu sont capables de remarquer SEULS ce genre de choses. Et du coup, on se retrouve à leur expliquer quand même à la fin... ;)
    L’inspecteur m’a conseillé d’orienter mes séances vers la PPC (=prise de parole prolongée, pas une simple phrase pour ceux qui me lisent), tous les prétextes étaient bons pour la travailler. Certes... mais l’inspecteur a observé une classe de 4è, dans laquelle il y avait 90% d’élèves que j’avais déjà eus l’an dernier... il les a trouvés très bon. C’est dommage d’oublier de dire qu’ils sont très bons parce que j’ai travaillé de la même façon que le jour de l’inspection. Et donc que ça marche !
    La méthode actionnelle est intéressante car je pense qu’elle permet vraiment aux élèves de comprendre (même si faire quelques exercices de grammaire en plus n’est pas du luxe... (chut, ne le dites pas à l’inspecteur, la grammaire est un gros mot maintenant !)).
    Tu dis que tu espères avoir un catalogue de cours bien fournis au fil des années... en fait, je crois que ça ne marchera pas comme ça. Exemple : j’ai eu ma formation il y a 3 ans et pourtant, je suis déjà obsolète, puisque la façon dont j’enseigne (que l’on m’a enseignée à l’IUFM donc) est trop dirigiste... alors qu’à l’inspection de titularisation, je n’ai eu que des compliments...
    Sans compter les mutations, quand on change d’académie, on change de façon de faire ! (parait-il qu’à l’académie de Nantes, ils forcent les collègues à mettre leurs tables en îlot pour favoriser l’interaction orale... sans parler de ce qui fait fureur dans l’académie voisine, et est complètement tourné en ridicule ici !)
    N’hésites pas à me contacter si besoin, l’enseignement, c’est loin d’être facile tous les jours :)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

9 décembre 2014

L'illusion d'imcompétence, vous connaissez ?

L’Illusion d’incompétence fléau méconnu de nos classes?

Aujourd’hui, je vais vous parler d’un sujet trop méconnu de nos classes l’illusion d’incompétence. Phénomène, qui selon une étude de Geneviève Marcotte toucherait près de 20% des élèves et qui n’est pas abordé une minute en formation initiale des professeurs et encore moins en formation continue tout au long de leurs carrières.

De quoi s’agit t-il ?

illsuion d'incompétence

L’illusion d’incompétence se définit comme:

« un décalage entre le potentiel, les compétences et capacités réelles d’un enfant et la perception qu’il en a »

Cette illusion d’incompétence se caractérise par un perfectionnisme négatif, des standards de réussite trop élevés que se fixe lui même l’enfant et qui le freine dans ses apprentissages.

Elle touche directement à l’estime de soi qui à l’âge du primaire se fonde essentiellement sur la compétence scolaire alors qu’au secondaire cette estime de soi va se baser sur l’apparence physique. (période de puberté et des premiers émois amoureux oblige)

estime de soi 2

Comment nait l’illusion d’incompétence chez un enfant?

Elle est tout d’abord le reflet d’une éducation donnée par les parents et complétée par l’école mais aussi une réception biaisée par les enfants.

En effet les parents véhiculent des stéréotypes comme le fait que les garçons seraient meilleurs en maths et les filles meilleures en Français. Un enseignant va aussi avoir tendance à véhiculer certaines valeurs d’excellence, qui mal amenées ou présentées, peuvent devenir un frein considérable aux apprentissages de par la naissance d’une anxiété et d’une peur de l’échec chez les enfants.

L’illusion d’incompétence trouve sa source dans ces scénarios mentaux que se font les enfants de ce que doit être la réussite et de ce qu’est la définition de l’échec. Ils sont tiraillés entre l’excitation, l’enthousiasme, la fierté et l’anxiété, la honte et le découragement.

Or le bien être des enfants passe avant toute chose par un sentiment de compétence personnelle.

 

Quelle sont les conséquences pour un enfant victime d’une illusion d’incompétence?

Selon une étude d’un chercheur québécois Philipps:depression

  • Son rendement est plus faible (touché en permanence par le doute, la peur et l’anxiété il est moins productif)
  • Il est moins persévérant (ne relèvera que peu les défis qui pour lui sont insurmontables. Son engagement est moindre ainsi que ces efforts car il est obnubilé par la peur de l’échec et de la nouveauté)
  • Il sera bien moins autonome car la prise d’initiative est anxiogène et il parvient peu ou pas à s’autoréguler.
  • Il est moins curieux et plus vite ennuyé.
  • Il se sous-estime et attribue ses succès à la chance (dévalorisation de sa compétence)

A terme cela pourra même engendrer

  • un isolement social (surtout dans une société qui véhicule l’idée de course à la performance)
  • un abandon scolaire prématuré
  • des difficultés à choisir son orientation

Pour Kolligan (1990) l’illusion d’incompétence qui toucherait les enfants serait à mettre en parallèle avec les troubles dont souffriraient certains adultes un peu plus tard, à savoir un sentiment d’imposture professionnelle, une tendance à discréditer ses réussites ou à les attribuer à la chance et qui mènerait à de très hauts niveaux d’anxiété, des burn-out ou des états dépressifs.

 

Comment remédier à l’illusion d’incompétence?

estime de soi

C’est un travail long et fastidieux car il faudrait profondément modifier les représentations mentales des enfants qui en souffrent. quelques points d’appui peuvent pourtant être présentés:

  • individualiser les activités et différencier au maximum (chaque élève travaille donc à la mesure de ses capacités)
  • avoir une attitude bienveillante en tant qu’enseignant (valoriser le moindre effort, se concentrer sur l’encouragement et les réussites plus que sur la comparaison avec une norme ou des programmes)Être dans l’éducation positive.
  • Prendre le temps d’expliquer les échecs, les relativiser, les discuter.
  • Instaurer dans la formation (initiale et continue) des professeurs un module sur l’illusion d’incompétence.
  • Promouvoir l’effort et le goût de celui-ci plus que l’excellence.
  • Crée un climat de classe serein et rendant possible l’émulation plus que la compétition.
  • Favoriser un dialogue des émotions et des ressentis par rapport aux apprentissages (une fois par semaine, qu’as tu compris,Comment t’es tu senti par rapport à ces notions nouvelles? qu’as tu trouvé difficile, pensais tu réussir, es-tu heureux d’avoir réussi?)

Vaste sujet, me direz-vous mais il n’est pas trop tard pour s’y intéresser et pour tenter ensemble d’y trouver des solutions.

Vous pouvez d’ailleurs proposer les vôtres ou vos réflexions personnelles dans les commentaires de cet article je serais ravi d’en discuter avec vous.

Pour aller un peu plus loin dans la réfléxion je vous conseille ces liens:

Bien à vous

Monsieur Mathieu

mon blog,   ma page FB

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